Je me suis plusieurs fois demandé si les gens de ma ville ou de ma propre famille n’auraient pas dénoté chez moi une attitude curieuse lorsque je passe quelques jours en France. L’attitude de celui qui rentre au pays…
En quoi consiste-elle? En voici un bon exemple : il y a quelques années, dans la chambre d’étudiant de mon frère, en allumant la télé, je tombe sur une émission de Michel Drucker, célèbre présentateur télé, un « dinosaure » de la télévision française, sourire faux-cul, personnage lisse, toujours dans le sens du vent (jamais polémique, jamais de problème avec quiconque) mais surtout indéboulonnable (30, 40 ans à son poste). Bref, un personnage qui m’avait toujours laissé indifférent dans ma jeunesse! Comment expliquer à mon frère que ça me faisait du bien de retrouver la voix et le sourire idiot de Michel Drucker?
Même impression dans ma ville. Dans la rue principale, je me promène, sourire aux lèvres, j’observe, je pose des questions, je demande ce qui a changé, j’entre dans les boutiques juste pour regarder. On doit me prendre pour un illuminé…
La tranquillité qui était autrefois synonyme d’ennui, d’immobilité et d’inaction est maintenant repos et calme. Les petites choses que vous critiquiez sans retenue vous tiennent désormais à cœur. Vous les défendez parce que vous vous retrouvez en elles.
C’est le moment des retrouvailles. On retrouve le pays et la ville natale comme on retrouve un visage connu. On redécouvre des musiques et des sons, des détails de la vie courante qui autrefois nous paraissaient insignifiants, des paysages (le vert des campagnes environnantes, les vignes du Mâconnais) auxquels les gens du pays se sont depuis longtemps habitués, des gestes qui sont pour eux devenus machinaux et routiniers.
Vous revoyez le même tableau, la même photo dans un état d’esprit nouveau.